Ou comment instrumentaliser une découverte exceptionnelle !

Jusqu'à récemment, la datation Carbone-14 n'était jamais utilisée pour tester des os de dinosauriens semblant incomplètement minéralisés, car l'analyse est seulement fiable jusqu'à 55 000 ans. Les scientifiques n'ont évidemment jamais considéré que cela valait la peine d'exécuter ce test, car il est généralement admis que les dinosaures se sont éteints il y a 65 millions d'années.

Mais Hugh Miller, fondateur du groupe de recherche de paléochronologie a déclaré :

« Il est devenu clair, il y a des années, que les paléontologues ne négligent pas seulement de tester le contenu C-14 des os de dinosaures, mais qu’ils refusent de le faire. Normalement, un bon scientifique sera curieux de connaître l'âge des os fossiles importants. J'ai organisé le Groupe de Paléochronologie en 2003 pour combler un vide en ce qui concerne le fossile du bois et les os de dinosaures, car j'étais curieux quant à leur âge par datation C-14. Nous avons donc utilisé la datation C-14 pour résoudre le mystère, pourquoi des tissus mous et des représentations de dinosaures existent dans le monde entier. Notre modèle présage que les os de dinosaures auront une teneur C-14 significative et, effectivement, ils ont entre 22 000 et 39 000 ans BP ».


Ces scientifiques soutiennent donc que les dinosaures n’ont pas totalement disparu il y a des millions d'années et qu'il existe des preuves substantielles qu'ils vivaient encore il y a 23 000 ans. (http://enigma.over-blog.com/dinosaures-survivants-datation-carbone-14.html)

Evidemment certains évolutionnistes réagissent alors violemment, persuadés, bien à tort, que si on touche à la chronologie telle qu’elle est admise, tout l’édifice scientifique s’effondrera ! L’une de leurs armes favorites est le dénigrement des hérétiques qui s’opposent à leur doxa. Et si cela ne suffit pas, ils n’hésitent pas à faire exclure les récalcitrants des structures où ils opèrent : laboratoires universités, etc. Nous connaissons déjà cela au CNRS et à l’INRA.

C'est dans ce climat délétère qu’éclate une affaire que le créationniste Neuwmann s’empresse de faire mousser sur son site. (http://freedomproject.com/the-newman-report/431-university-fires-scientist-after-dinosaur-discovery-challenges-evolution)

Et que Ré-information TV (là bien mal nommée) nous gratifie d’un article étonnant, au sous-titre prometteur : « Terre jeune : le chrétien Mark Armitage licencié par l’université de Californie pour avoir découvert des tissus mous sur un dinosaure, ébranlé le dogme évolutionniste et questionné la chronologie longue de la Terre » (sic !) (http://reinformation.tv/tissus-mous-dinosaure-chronologie-longue-evolution-mark-armitage-licencie-universite-lenoi-r77882-2/)


Sur la manipulation faite par l’article

Cet article sur « des tissus mous de la corne » n’en serait qu’une nouvelle confirmation : l’idée d’une disparition globale, brutale, de toute la faune dite du Crétacé, à la suite d’un impact météoritique il y 65 millions d’années est à revoir complètement !

Mais il est bien évident, enfin il devrait l’être, que le fait que la datation absolue soit prise en défaut et que le scénario soit à revoir n’implique pas que cela démontre, a contrario, que la chronologie biblique soit avérée !

C’est une escroquerie mentale dans laquelle a plongé sans état d’âme l’auteur de cet article, et cela est tout à fait scandaleux – et peu à l’honneur du monde créationniste – que de patauger dans ce genre de sophisme !

Il devient clair que des Cératopsiens étaient encore présents sur la surface du globe en une période relativement récente « compatible » avec le maintien de tissus organiques non encore totalement minéralisés par le processus de fossilisation.

Encore que l’on n’ait dans l’état actuel de nos connaissances aucune capacité d’évaluation de cette fourchette de « compatibilité »…

Là où le bât blesse, c’est quand l’auteur en a profité d’emblée pour balancer une profession de foi biblique qui n’a absolument rien à faire là :

Mark Armitage relève en effet que « les os de dinosaures ne peuvent pas être anciens s’ils restent entourés de tissus mous ». La découverte « contredit la théorie des temps antédiluviens », conclut Newman.

Cela n’a strictement aucun sens du simple point de vue de la rigueur et on y flaire l’instrumentalisation.

J’ai visité en Irlande du nord, il y a trente ans, une petite église fort célèbre pour sa crypte, une construction du IXeme siècle où on a retrouvé deux corps en parfait état de conservation qui y sont exposés : une nonne et un supplicié dont les mains et les pieds avaient été coupés; Des corps quasi intacts, avérés historiquement comme datant de plus de mille ans, quand la médecine légale admet et professe qu’un cadavre est réduit à l’état de squelette entre « au mieux » dix ans et « au pire » cinquante. (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ferme_des_corpsomme)

Comme quoi la réalité d’une datation peut réserver des surprises. Mais que cela remette en cause une durée n’a aucun rapport !

Etc’est là que la manipulation idéologique est patente et n’est pas admissible : mettre en évidence qu’une datation est fausse ou qu’une durée est plus limitée qu’on ne l’a laissé supposer, n’implique absolument pas que la théorie dite créationniste d’une datation estimée de l’âge de la terre par exégèse biblique, soit 5578 ans, soit avérée.

Entre 4,5 milliards d’années et 5578 ans (calendrier hébreu) il y a tout même de la marge… pour intercaler des temps anti-diluviens !

Certains biblistes se donnent d’ailleurs beaucoup de mal pour faire coïncider les deux, à grand coup d’invocation notamment de la relativité, ce qui montre là encore que la démarche d’Armitage procède d’une simple affirmation personnelle, fondée sur un « ressenti » ou sur une « conviction », ce qui n’a donc rien de « scientifique ». (https://www.calj.net/age-du-monde)


On conçoit que ce genre de sophisme, et d’obstination professée, ait quelque peu « énervé » les instances universitaires ! On pourra souligner au passage que les travaux du groupe du professeur Miller ont été publiés et ont fait l’objet d’une présentation très officielle, notamment à la conférence de Singapour (5 aôut 2015) (www.dinosaurc14ages.com)

S’ils n’ont évidemment pas été forcément bien accueillis, vu les interrogations qu’ils suscitaient, ils n’ont pas été rejetés a priori par l’Université de Californie qui n’a fait que sanctionner, beaucoup plus tard, une extrapolation idéologique hasardeuse et partisane, fruit du seul militantisme créationniste de Mark Armitage !

Pourtant la découverte d’animaux, réputés « antédiluviens » bien vivants à l’époque historique, n’est pas un phénomène nouveau et n’a jamais conduit à remettre l’évolution en cause.

C’est ainsi qu’un jour aux Comores - si à la fin du XIXeme siècle on avait déjà retrouvé des spécimens de cœlacanthes morts - en 1938, on a mis en évidence qu’une espèce de Cœlacanthe, supposée disparue depuis la fin du primaire, existait encore à l’état de population rélictuelle dans « l’aquarium naturel » que constituait une fosse marine.

On voit donc que toute cette affaire Armitage est une pure manipulation du lobby créationniste.

Il est d’ailleurs cocasse de constater que ce même lobby, qui jusqu’ici a systématiquement vilipendé les datations au carbone 14, qui ne confirmaient pas leurs hypothèses pour l’émergence de l’homme préhistorique, s’appuie maintenant dessus !

Et tout aussi cocasse d’en relever la contradiction majeure : Si on considère maintenant comme avéré que des Tricératops et d’autres espèces supposées « disparues à la fin du Crétacé » vivaient il y a encore 25 000 ans, on ne peut pas en même temps expliquer que cela «prouve» que le monde a été créé il y a 5578 ans !

Il y a des limites à l’absurdité tout de même !


Sur le fond : la corne vraie des Cératopsiens

« Corne » est une mauvaise appellation morphologique qui correspond à une formation à croissance continue depuis la peau de sa base (périople) d’un étui de kératine qui entoure initialement un cornillon, excroissance osseuse symétrique, souvent bilatérale de l’os temporal, comme c’est la règle chez les Mammifères Artiodactyles (Voir notre analyse anatomique de la corne, présentée dans notre article précédant sur les licornes : http://terrefuture.blog.free.fr/index.php?post/2017/10/02/Pour-en-finir-avec-le-%C2%AB%C2%A0mythe%C2%A0%C2%BB-de-la-licorne )

Ce cornillon va servir à la fois de guide lors du début de la pousse de la corne proprement dite qui va l’entourer comme un manchon, puis par la suite avoir un rôle de soutient lorsque la corne dépasse plus ou moins largement le cornillon parvenu à sa taille maximale.

De ce fait, la corne proprement dite apparaît comme l’étui corné et hypertrophié du cornillon. Elle est creuse.

Ce qui se voit ici très clairement sur ce crâne de bouquetin, mort depuis longtemps où les tissus cutanés totalement disparus ont libéré la corne de toute attache, c’est qu’elle est tombée, désolidarisée de son cornillon :

Sans un cornillon osseux sous-jacent, une « corne vraie » ne peut pas se développer. C’est l’étui creux de kératine secrété par l’épiderme différencié (périople) présent à sa base. Or, la kératine, comme la plupart des formations organiques ne se fossilise pas ; ce qui se fossilise c’est le cornillon osseux sous jacent, partie intégrante du squelette.

Les Cératopsiens, bien que considérés encore comme appartenant aux Reptiles, ne sont plus des Dinosaures vrais au sens zoologique du terme (quoi qu’en disent encore certains rédacteurs peu avertis). Ils constituent une famille très homogène, évolutivement considérée comme postérieure aux Dinosaures.

Ils disposent des plus gros crânes jamais observés en faune aérienne et montrent la présence de cornes vraies : une nasale et deux latéro-craniennes au-dessus des orbites(Triceratops) voire quatre (Pentaceratops) en comptant, en sus, les deux les excroissances cornées symétriques qui encadrent les mâchoires au-dessus en arrière et des condyles articulaires (Voire jusqu’à sept chez le Styracosaurus albertensis, un cas unique aberrant qui portait 6 cornes symétriquement réparties sur sa collerette).


Ce qu’il faut retenir, c’est que ces animaux disposant de cornes vraies, comme chez les Mammifères, ce qu’on retrouvera, fossilisés, ce seront donc les cornillons osseux.

Dans le cas qui nous occupe, le cornillon fossilisé semble mesurer 70 cm ou 80 cm ce qui laisse présager une corne de largement plus d’un mètre de long…



Cette corne de tricératops a été trouvée en mai 2012 et déposée au Glendive Dinosaur and Fossil Museum. Le musée, qui depuis 2005 coopère avec le Paléochronology Group, a envoyé un échantillon de la partie extérieure de la corne à la demande de Hugh Miller, afin de réaliser des datations au Carbone 14.

Hugh Miller a donc envoyé l'échantillon à l'Université de Géorgie, centre d'études appliquées sur les isotopes, pour y effectuer les tests.

L'échantillon a été divisé en laboratoire en deux fractions :

1) fraction de produits en manque de collagène ayant un âge de 33,570 ± 120 ans

2) fraction de carbonate de la bio-apatite osseuse ayant un âge de 41,010 ± 220 ans

[UGAMS-11752 et 11752a]

Hugh Miller a expliqué que pour les échantillons d’origine ancienne, il est toujours préférable de réaliser une datation C-14 de plusieurs fractions pour minimiser la possibilité d'erreurs, et que la concordance essentielle a été atteinte avec toutes les fractions osseuses de dix autres « dinosaures ».

Il semblerait, même si c’est très mal rédigé ici, que Mark Armitage ait retrouvé des fragments du périople à la racine du cornillon : dire que « la corne est entourée de tissus mous » est évidemment un abus de langage et ne correspond à aucune réalité zoologique !

Les analyses génétiques de ces fragments seraient certainement riches d’enseignements. Quant à l’époque de la mort de cet animal, une seule chose est sûre, ce cadavre n’est pas là depuis 65 millions d’années !

L’expérience montre que les endroits de conditions de fossilisation exceptionnelles recèlent en général logiquement un bon nombre d’échantillons.

On doit donc s’attendre à trouver dans ce secteur de fouilles :

  • d’une part d’autres éléments de squelette de cet animal dans le même état de conservation,

  • d’autre part des spécimens d’espèces diverses pouvant présenter des traces plus ou moins importantes de tissus conservés, et qui seraient contemporaines du Tricératops défunt….

Cela étant dit, ces découvertes sont tout à fait passionnantes et il est malheureux de voir, qu’au lieu des recherches prometteuses qu’elles devraient initier, elles soient d’emblée aussitôt dévoyées de la sorte et exploitées idéologiquement !

Claude Timmerman.