h-20-2212793-1284022570.jpgLa multiplication des fastfoods ou points de vente « halal » mettent la pratique religieuse au centre de l'alimentation. L'OABA, œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoir, entend de son côté promouvoir l'éthique dans la production de viande. Rencontre avec Fanny Allmendinger, vétérinaire alsacienne et administratrice de l'association. L'abattage rituel des animaux suppose de saigner la bête vivante et sans insensibilisation. Cette pratique, acceptée au nom de la liberté religieuse, déroge à la législation française et européenne qui édicte l'étourdissement préalable à toute mise à mort pour limiter les souffrances à l'abattage. Le problème, soulevé par plusieurs associations militant pour le bien-être animal dont l'OABA, est que la dérogation prend de plus en plus d'ampleur et pas seulement pour des raisons de fondements religieux. Le marketing, l'accélération de la production et un certain laxisme dans l'application de la réglementation transforment l'exception en pratique courante.

Cette banalisation est d'autant plus regrettable que le « développement de la viande halal semble plus relever d'une mode » que d'une conviction religieuse. « Et le problème, c'est que beaucoup de consommateurs ne savent pas vraiment ce que c'est. Ils ignorent que les animaux ne sont pas étourdis avant d'être égorgés », regrette Fanny Allmendinger, vétérinaire dans la région strasbourgeoise.



Auteur fin 2008 d'une thèse soutenue à l'école nationale vétérinaire d'Alfort sur la bientraitance des bovins à l'abattoir, Fanny Allmendinger a été récompensée pour ses travaux par l'OABA avant de rejoindre l'association œuvrant pour l'assistance aux bêtes d'abattoir. Et pour éviter tout amalgame regrettable, elle prévient tout de suite : si l'abattage rituel, halal ou casher, fait l'objet d'un chapitre dans sa thèse, il n'est qu'un aspect de son propos qui milite de façon bien plus large pour épargner toute souffrance inutile à l'animal que ce soit dans son acheminement à l'abattoir, son déchargement, son parcage, sa mise en attente et finalement son abattage. « Tout ce qui est susceptible de stresser ou de faire souffrir l'animal est à bannir. » D'autant que stress, douleur et évidemment blessures détériorent la qualité de la viande (acidité, risques de viande fiévreuse, aspect, durée de conservation...). « On a tout à gagner économiquement avec la bientraitance. Sans parler de qualité nutritionnelle. »

A ces doubles titres, l'étourdissement avant abattage (en général par trépanation) s'impose comme la seule procédure acceptable et Fanny Allmendinger a développé dans sa thèse les arguments en faveur d'une insensibilisation par électrocution, qu'elle estime compatible avec les préceptes de viande halal ou casher. « L'électronarcose est d'ailleurs déjà acceptée dans de nombreux pays par les autorités religieuses. » En France, elle est couramment utilisée dans les abattoirs halal de volaille, alors pourquoi pas pour les bovins et les ovins ?

Au consommateur aussi de se préoccuper un peu d'éthique et de réclamer de manière générale plus d'humanité pour les bêtes qu'on abat. « Un projet d'étiquetage européen devrait à terme imposer la mention de l'étourdissement ou non avant abattage », mais la mesure est régulièrement reportée, au grand dam de l'OABA.

SIMONE WEHRUNG